" Je vais vider mon coeur de tout son pus ".
C'est une fulgurante claque que je viens de prendre à la lecture de ces saisons de Maurice Pons.
Présenté comme un " livre-culte " dont je n'avais jamais entendu parler avant, j'en émerge encore hypnotisé, comme à la sortie d'un de ces rêves glauques, dans lequel on entre avec un plaisir presque coupable, quelque part entre la nuit et l'aube.
À la fois fable hypnotique, conte cruel, parabole mythologique, et pourtant inclassable. L'écriture est puissante, mordante, savoureuse, d'une ironie pleine à chaque ligne ou presque..
Oui, vraiment, culte.
L'Arrachée belle, ou la femme qui marche.
Récit déroutant, splendide, d'une métamorphose - une femme s'enhardit de solitude, se fond dans la nature, reprend corps.
Ce qui se joue dans ce cheminement ouvre une brèche majeure dans nos vies. Bravo.
Une puissance rare, un rythme percutant, une poésie glaçante qui raconte la violence systémique et la destruction des âmes.
Le sang des Atrides coule dans ces personnages réunis habilement dans un même souffle choral, théâtral. De l'ordre même de la tragédie antique. Bien plus qu'un livre sur la Mafia et son emprise sur les vies, c'est une habile réécriture du mythe du Minotaure, au coeur du labyrinthe de l'indicible.
Un époustouflant premier roman.
Le Haruki Murakami du Lubéron
Il y a quelque chose de profondément envoûtant dans cet objet lumineux. Quelque chose de l'ordre de l'oreillette de Daudet (madeleine de Proust provençale). C'est un palimpseste où viennent affleurer tour à tour Daudet, Pagnol, Giono, Bosco, et le grand Frédéric.
Et ça réveille les souvenirs d'enfance, de ces lectures provençales sous le figuier, guetté par la torpeur de la sieste estivale.
Une histoire de mur qui s'effondre un soir d'orage, mettant à nu un ancien trésor oublié. Une histoire de main tendue, entre le passé et le présent, une transmission, un héritage.
Et puis un chant du monde aussi, une langue dont la musique s'écoute les yeux clos, dans cet océan de calcaire, d'ocre et d'azur, poli par le Soleil inquisiteur et le Mistral turbulent.
Et passent un chat, une chèvre blanche bien connue, et comme toujours dans ce paradis là, une histoire de source. Et que surgisse alors le flot des légendes endormies.