Conseils de lecture
La vie de radeau
Le réseau deligny au quotidien
De Jacques Lin
Préface de Thierry Garrel
Le Mot et le reste
C'est une histoire de déviation.
Été 1967, congés payés. Jacques Lin, 18 ans, ouvrier spécialisé en banlieue parisienne, prend la route du sud. Cap sur la Yougoslavie, où l'attendent les radeaux de la Drina et une amoureuse.
Le voyage bifurque dans les Cévennes : le temps de recevoir son passeport, Jacques fait halte près de Monoblet, chez Félix Guattari. La maison accueille, cet été-là, ouvriers, médecins, psys, étudiant.e.s. Jacques y fait deux rencontres décisives : Janmari, enfant autiste, et Fernand Deligny, pédagogue. Fin août, quand les vacancier.e.s s'égaillent, Jacques choisit de rester aux côtés de Janmari et des adultes qui l'accompagnent. Il y habite encore.
La Vie de radeau est le récit de cette aventure humble et singulière développée entre une poignée d'adultes et quelques enfants autistes, dispersé.e.s dans les hameaux cévenols. C'est un récit de quotidien, où la soupe, la vaisselle, la coupe du bois, ont leur importance – car au creux de ces gestes, de ces rythmes, s'élaborent des tentatives pour apaiser les enfants accueilli.e.s. Et le témoignage de ces heures patientes chavire radicalement le rapport au langage, à l'espace, au travail, à la famille.
Plusieurs mois après lecture, j'en reste éblouie.
Ceci n'est pas une histoire d'amour.
Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'amour, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit ! L'amour, il est même partout : il s'est glissé entre les pages et vous tombe dessus par surprise. (Et même que vous en retrouvez partout chez vous ensuite, comme les confettis du carnaval.)
Parce que, ce que ce roman raconte, c'est une relation. Ce lien magique et unique qui se tisse parfois entre deux êtres humains. Ça n'appartient qu'à eux, mais Sally Rooney nous a fait ce cadeau.
Lisez-le !
Renversante
(y'a encore du boulot)
De Florence Hinckel
Illustrations de Clothilde Delacroix
École des Loisirs
Léa et Tom sont jumelles et viennent d’avoir 15 ans. Dans le monde qui est le leur, le féminin l’emporte sur le masculin, à tous points de vue. À travail égal, les hommes sont moins payés que les femmes ; la culture du viol les empêche de se sentir en sécurité dans la rue ; le female gaze les assomme d’injonctions à être minces, beaux, lisses ; leurs carrières sont entravées par les rôles que la société leur assigne, etc. En espérant convaincre son frère d’inviter ses copains (que des jolis mecs!) à leur fête d’anniversaire, Léa tente de se mettre à la place de Tom pour comprendre ce que vivent les garçons de son âge…
Cette vision en miroir est très efficace pour sensibiliser les plus jeunes aux violences sexistes et sexuelles : chaque paragraphe, chaque phrase contient de quoi passer au blender notre cerveau si bien conditionné ! On reste bouche bée face à ce château de cartes qui s'écroule… Puis, doucement, on s’attelle à poser de nouvelles fondations grâce aux discussions et débats qui naissent entre les personnages. Florence Hinckel, l’autrice, parvient à emporter les lecteurs et lectrices dans le courant de cette réflexion : au même rythme que Léa, on est surpris·e, touché·e, on écoute, on réfléchit et… on évolue ?
À (faire) découvrir dès 11 ans.
Irene Solà nous embarque dans un récit sans âge, perché sur les hauteurs catalanes. Dans une langue aussi abrupte que les montagnes qui griffent ces paysages, elle en dresse le portrait, à travers le regard de tout ce qui les constituent : hommes et femmes - d’hier et d’aujourd’hui -, bêtes sauvages, créatures mythologiques, nuages chargés d'électricité, vestiges de batailles. Toutes ces histoires, tous ces points de vue s’entrecroisent petit à petit, s’assemblent dans une trame de plus en plus serrée, jusqu’à ce qu’on ne puisse plus en dénouer les fils.
Champignon né de la dernière pluie, ou sorcière surgie du passé, iels chantent et la montagne danse.
On peut tomber amoureux d’un pays, d’un endroit ; ce roman en est la preuve. Magistral !
Un documentaire qui va faire des vagues !
Vous sentez ? C'est l'été qui approche, et avec lui le temps des baignades et des châteaux de sable... Au fait, saviez-vous que le sable est composé de minuscules cailloux, mais aussi de coquillages et de coraux ? Saviez-vous aussi que certaines algues sont munies de petits flotteurs, pour se maintenir au plus près de la surface et du soleil ?
"Le Super week-end de l'océan" de Gaëlle Alméras rassemble mille et une informations de ce genre, et plus encore ! Courants et fonds marins, phytoplancton et cétacés... grâce à cette chouette BD de vulgarisation, vous saurez bientôt tout sur l'océan et ses étonnants habitants. Le contenu est dense, mais tout se fait en douceur : 4 petits personnages sont en vacances sur la côte, se posent des questions, et s'apportent les un·es les autres des explications savantes, appuyées sur de très belles illustrations finement détaillées - dont 5 panoramas à déplier. De quoi en prendre plein les mirettes !
L'ouvrage bénéficie de la caution d'une chercheuse de l'Ifremer, ce qui en fait un véritable objet scientifique, à la fois complet et accessible. Il saura combler la soif de découvertes des petits comme des plus grands, et pourquoi pas donner envie à certain·es de poursuivre l’exploration…
De 8 à 108 ans.